Des rosacées « malignes » : une présentation parfois révélatrice de lymphoprolifération B à petites cellules

Introduction La rosacee est une dermatose faciale frequente, aux diagnostics differentiels varies. Nous rapportons ici trois hemopathies lymphoides B avec atteinte cutanee secondaire atypique evoquant une rosacee. Observations Cas 1 : un homme de 76 ans presentait un rhinophyma depuis un an. Devant l’aspect atypique micropapuleux violace sans antecedent de rosacee, pouvant suggerer un angiosarcome, une biopsie etait realisee, montrant une localisation d’un lymphome de la zone marginale (LZM). La TDM montrait des adenopathies lomboaortiques et la biopsie medullaire un envahissement. Un traitement par 6 cures de R-CVP etait realise, permettant une regression de l’atteinte cutanee nasale et une stabilite des adenopathies profondes. Cas 2 : une femme de 75 ans, suivie depuis un an en hematologie pour un LZM avec hyperlymphocytose moderee et splenomegalie, en abstention therapeutique, etait adressee en dermatologie pour une dermatose du visage consideree comme une rosacee. On observait de multiples papules rosees millimetriques, sans pustule ni couperose. La biopsie confirmait la localisation cutanee du LZM. Apres 2 lignes de traitement inefficaces, un traitement par fludarabine et cyclophosphamide permettait une remission clinique cutanee. Trois ans plus tard, une transformation en lymphome B diffus a grandes cellules de localisation ORL conduisait a son deces. Cas 3 : une femme de 75 ans, suivie pour une hyperlymphocytose consideree comme une leucemie lymphoide chronique (LLC) en abstention therapeutique depuis 5 ans, etait adressee en dermatologie apres l’exerese d’un nodule cutane dont l’histologie etait en faveur d’un LZM. On notait un erytheme des paupieres inferieures non infiltre, des micropapules rosees du visage et du cuir chevelu et une adenopathie cervicale. L’histologie cutanee et ganglionnaire concluait a un lymphome lymphoplasmocytaire et un traitement par rituximab etait debute. Discussion Les LZM cutanes primitifs se presentent classiquement comme des nodules ou des tumeurs isolees ou multiples du tronc et des membres. L’atteinte cutanee de nos trois patients est donc differente, particuliere et stereotypee. Il ne s’agit pas non plus de l’atteinte cutanee classique de la LLC a type d’infiltration des lobules des oreilles et du nez. Cette presentation clinique rare et trompeuse a ete rapportee dans des lymphoproliferations B a petites cellules, lymphomes folliculaires et LZM essentiellement cutanes primitifs, comme dans 10 des 12 cas de la serie de Barzilai et al. en 2012. Les autres observations publiees isolees sont egalement cutanees primitives sous reserve de l’exhaustivite du bilan, pas toujours precisee. Conclusion L’atteinte cutanee primitive ou secondaire des hemopathies lymphoides B peut mimer une rosacee et etre revelatrice. Cette presentation trompeuse doit etre connue du dermatologue.