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Numéro 38 - mars 2006

2018 
Le dicton populaire n’a cesse de le dire : l’argent ne fait pas le bonheur. Les enquetes aupres de la population semblent le confirmer. Malgre une croissance economique continue, la "satisfaction de vie" moyenne des Occidentaux stagne depuis plusieurs decennies (voir les graphiques annexes). En Belgique, alors que le PIB reel par habitant a augmente de 80 % depuis 1973, le niveau de satisfaction de vie moyen a diminue de 8,8 %. Pourquoi la croissance economique, tant recherchee, si peu remise en question, ne parvient-elle pas – ou plus – a augmenter le bien-etre de l’homme ? Celui-ci n’est-il jamais satisfait de ce qu’il possede ? Lui en faut-il toujours plus ? Ou est-ce la croissance elle-meme qui com­porte trop d’effets secondaires negatifs ? Qu’en disent les economistes ? Une large partie de la litterature economique laisse entendre que la satisfaction de la population croit avec le revenu reel. Des lors les gouvernements et les grandes institutions peuvent inlassablement pro­clamer, au nom des peuples et de leur bien-etre, que la croissance economique est un objectif prioritaire. Toutefois le developpement d’un nouveau courant de recherches vient secouer les convictions traditionnelles. Ciblees sur l’explication de la satisfaction de vie, ces etudes apportent un fondement scientifique a deux constats de bons sens : toute richesse est relative, et la richesse n’est pas tout. Premierement, la richesse a toujours une valeur relative. Relative par rapport au passe : chaque per­sonne s’habitue a ce qu’elle possede; elle revoit continuellement ses normes materielles a la hausse et comble ainsi difficilement ses aspirations. Relative aussi par rapport a la richesse des autres : le bien-etre que l’individu retire de son propre revenu depend bien souvent du revenu du voisin; pour que le bien-etre s’accroisse, il ne suffirait pas "d’avoir plus", encore faudrait-il "avoir plus que les autres". Ainsi l’ensemble de la population se laisse entrainer dans une course sans fin dont le but est fuyant. Deuxiemement, la richesse n’est pas tout. La stagnation de la satisfaction de vie, malgre la hausse des revenus, peut provenir de nombreux facteurs non-pecuniaires : la montee des inegalites; le chomage; la degradation des conditions de travail (cadences, precarite); l’augmentation du stress, de l’anxiete et des cas de depression; l’affaiblissement des liens familiaux et sociaux et du lien entre les citoyens et les institutions ou les mandataires politiques; la degradation de l’environnement. Certains de ces facteurs sont etrangers a la croissance economique, d’autres au contraire sont generes par le type de croissance que nous avons connu. Les resultats qui ressortent de l’ensemble de ces etudes comportent deux implications fortes, qui vont de pair. D’une part, ils appellent le developpement, au dela des enquetes, d’indicateurs de bien-etre, solides et fiables, susceptibles de completer ou de corriger la traditionnelle comptabilite nationale, et de casser l’amalgame trop frequent entre PIB et bien-etre. D’autre part, ils revelent l’urgence d’une reflexion sur la finalite de la croissance et sur son contenu : pourquoi et pour qui voulons nous plus de croissance ? Existe-t-il un consensus sur les objectifs poursuivis et est-on bien sur que notre type de croissance les serve ? Tenter de repondre democratiquement a ces questions pourrait etre un premier pas vers une satisfaction de vie accrue.
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