Importance épidémiologique, clinique et biologique des hémopathogènes vectorisés lors d’anémie chez le chien : étude prospective de 134 cas
2016
L’anemie est un syndrome frequemment rencontre en pratique quotidienne chez le chien dont le diagnostic etiologique permet l’initiation d’un traitement approprie. Une etude retrospective rapporte que 151/456 (33 %) cas d’anemie accompagnaient une neoplasie, 130 (28 %) une condition inflammatoire et 35 (7,7 %) une « infection » au sens large [1] . Alors que l’importance des hemopathogenes vectorises (HV) est grandissante en Europe, le caractere retrospectif de l’etude n’a pas permis d’identifier leur frequence. Une seule serie chez des chiens anemies rapporte une frequence des HV de 287/2037 (14,1 %) [2] , qui a probablement ete mesestimee, en l’absence de recherche par PCR. A ce jour, aucune etude n’a evalue l’implication des HV lors d’anemie chez le chien en France, par recherche PCR exhaustive systematique. Notre etude prospective rapporte la frequence, l’impact clinique et hematologique des HV chez des chiens anemies, admis dans un centre hospitalier veterinaire universitaire sur une periode de 1 an (mai 2014–mai 2015) via a une recherche systematique PCR et serologique. Les chiens anemies sont inclus avec un hematocrite (Ht) = 37 % et une hemoglobine (Hb) = 12 g/dL et exclus lors d’administration prealable de doxycycline ou d’imidocarbe le mois precedent l’admission. La recherche et l’identification des HV sont basees sur des methodes directes (microscopie optique et PCR detectant Babesia sp., Ehrlichia canis , Anaplasma platys/phagocytophilum , des rickettsies du groupe des fievres boutonneuses, Mycoplasma haemocanis (MH) – Candidatus M. haematoparvum et Hepatozoon spp). Des recherches indirectes sont realisees en complement (SNAP ® 4Dx, SNAP ® Leish). Un cas d’anemie accompagne d’un HV (AHV) est defini par un resultat PCR positif valide par sequencage. Par ailleurs, l’etiologie de l’anemie est etablie pour chaque cas par un resident de medecine interne (MI) encadre par une equipe de specialistes. L’analyse statistique decrit la frequence des AHV dans la population globale, l’epidemiologie, la frequences des anomalies cliniques et paracliniques globales (test binomial avec intervalle de confiance a 95 % [IC95 %]) et compare ces parametres entre les cas d’AHV et les non-cas d’AHV (analyse univariee test de Fisher : p = 0,05, autorisant une regression logistique multivariee : ACM avec evaluation des risques relatifs : RR). Sur la periode d’etude, 155/7038 chiens anemies sont repertories (2,20 %, IC95 %, 1,87–2,57) dont 21 exclus, car traites avec de la doxycycline ou imidocarbe. Les 134 cas inclus regroupent 62 femelles, 72 males, âges de 6 a 204 mois, dont 56, 41 et 37 hospitalises en cancerologie, MI et soins intensifs. Les Bouviers bernois sont surrepresentes par rapport a la population repertoriee la meme annee ( p = 0,01). Les symptomes frequents sont : abattement (56 %, 47,1–64,5), hyperthermie (44,0 %, 35,5–52,9) et pâleur (35,8 %, 27,7–44,6). On compte 25/134 cas d’AHV (18,7 %, 12,5–26,3). Ils incluent 11 positifs pour MH (44,0 %), 9 piroplasmoses (36,0 %), 2 piroplasmoses positives pour MH (8,00 %), 2 anaplasmoses plaquettaires (8,00 %) et une ehrlichiose monocytaire (4,00 %). Onze autres chiens ont un test serologique positif (10 SNAP 4Dx ® et 1 SNAP Leish ® ). La frequence des cas positifs pour MH est significativement plus importante parmi les chiens suivis en cancerologie (10/56, 17,9 % contre 3/78, 3,85 %, RR : 2,69, IC95 %, 1,00–7,32, p = 0,01). Les HV sont la premiere cause d’hyper-hemolyse (14/44, 31,8 %, 18,6–47,6). A l’analyse multivariee, les indices epidemio-cliniques ne different pas entre les cas et les non-cas d’AHV. Par contre, les cas d’AHV presentent une anemie significativement moins severe, plus regenerative et une numeration blanche significativement plus importante que les non-cas d’AHV ( p = 0,005). La frequence des AHV (18,7 %) est plus elevee que celle rapportee precedemment [1] , [2] . D’autre part, les cas d’AHV semblent moins severes que les non-cas d’AHV (anemies moderee, regeneration plus forte), sans cause evidente. Les HV peuvent declencher une anemie par de multiples mecanismes. Ils peuvent perturber l’hematopoiese par suppression cytokinique (inflammatoire), anomalie de maturation des precurseurs erythroides (myelodysplasie transitoire secondaire), phenomenes hemorragiques (thrombopenie ou vascularite) ou, dans le cas le plus frequent ici, une hemolyse (mecanique directe, par augmentation de la fragilite osmotique des hematies, stress oxydatif, lyse immunologique ou combinaison de ces mecanismes) [3] . MH est l’HV majoritaire (13/25), surtout chez des chiens sous chimiotherapie : sa frequence globale (13/134, 9,7 %) est neanmoins proche de celle rapportee en France chez des chiens sains (15,4 %) [4] . Son impact clinique et son role dans la genese de l’anemie restent donc peu evidents ici. L’absence de suivi, ne permet pas comparer le pronostic entre les sous-groupes. En conclusion, ces donnees propres a notre institution, confirment l’importance des HV que le clinicien doit considerer dans son diagnostic differentiel face a une anemie chez le chien.
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