La Bête en l’Homme : l’animalité humaine dans l’oeuvre de Sade
2015
La notion d’animalite est au cœur des preoccupations du siecle des Lumieres comme de l’œuvre de Sade, qui la place au centre de son entreprise de destabilisation des valeurs et de son systeme scandaleux. Avec lui, l’animal apparait pour ce qu’il est veritablement au plan philosophique : un merveilleux dynamiteur de certitudes propre a ebranler tous les systemes trop rigides ; une bombe a retardement ethique susceptible de ruiner toute morale et d’autoriser tous les crimes ; un dangereux laboratoire intellectuel ou se theorise et s’experimente toute grande deshumanisation a venir. Heritier du materialisme philosophique de son temps, Sade refuse en effet de voir en l’Homme autre chose qu’un banal agencement d’atomes, qu’une tres ingenieuse mecanique, et fait ainsi de lui un simple animal parmi d’autres ; mais, a la difference de ses maitres a penser, lui entend bien tirer toutes les consequences morales d’une telle destitution metaphysique. Greffant a cette rentree dans le rang ontologique toute l’infamie de l’ancienne conception de l’animal, qui voyait en ce dernier sur le plan moral un inquietant concentre de tous les vices et de toutes les licences, l’ecrivain en vient a proposer la synthese aberrante des aspirations et des craintes de son epoque. Prenant la posture d’un Rousseau gagne au crime, il imagine une entreprise de renaturation pour le pire de l’espece humaine, ou l’Homme vient se faire loup pour l’Homme avec l’appui de la logique et la benediction de la raison. Programme de retour resolu a l’animalite qu’il ne parvient toutefois pas toujours a tenir, l’animal se revelant pour lui aussi un terrain philosophique piegeux.
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