Des risques psychosociaux à la qualité de vie au travail : quel rôle pour le service de santé au travail ?

2016 
Bien qu’implicitement evoques dans la directive cadre europeenne de 1989, la prise en compte des risques psychosociaux (RPS) par les services de sante au travail (SST) est bien plus recente, notamment sous l’effet du relais mediatique accorde a des cas groupes de suicide parmi les salaries de grandes enseignes nationales. Apres plusieurs annees de pratique, alors qu’un nombre croissant d’entreprises, souvent incitees a cela par les medecins du travail, se sont engagees dans une demarche de prevention des RPS, un premier bilan peut en etre dresse. Les chefs d’organisme affichent de plus en plus la volonte de donner une vision plus positive de la lutte contre les RPS, en substituant a la « prevention de la souffrance au travail » la « promotion du bien-etre au travail ». Mais malgre cette louable intention, et derriere l’inflation d’indicateurs et autres questionnaires, le passage a des mesures correctives concretes demeure trop rare. Les comites de veille et autres groupes de travail fleurissent, mais nombre d’entre eux ne parviennent pas a s’extraire de la gestion des troubles individuels pour s’elever a une maitrise collective des facteurs de risque psychosociaux. Alors que leur mission est d’aider a ameliorer l’efficacite de ces dispositifs, les acteurs des SST, notamment les medecins, sont places dans une situation complexe : suscitant aupres des employeurs une reflexion sur leur mode de management et l’organisation du travail, dans une optique de prevention primaire, le medecin est aussi confronte quotidiennement aux souffrances individuelles a un stade souvent si tardif que l’heure de la prevention est depasse et l’inaptitude parfois la seule issue. Afin de promouvoir un veritable processus d’amelioration de la qualite de vie au travail, les SST doivent porter un message clair. Pour etre efficace d’abord, en ne se contentant pas d’alerter, mais en guidant l’employeur sans se substituer a lui, avec le souci d’aboutir a des actions concretes, a partir d’outils valides revelant des pistes de solution. Pour eviter le risque d’instrumentalisation accessoirement, qu’il s’agisse de deleguer au medecin la gestion des situations degradees ou de rechercher des benefices secondaires, en s’appuyant parfois sur des notions juridiques mal maitrisees comme le harcelement moral. Agir en amont des troubles, privilegier l’action collective par rapport a la necessaire gestion individuelle, analyser les organisations sans mettre en cause les individus, recreer des collectifs de travail malgre la propension societale a l’individualisme sont les moyens et les conditions de la reussite de ce processus, dans lequel l’equipe pluridisciplinaire de sante au travail a toute sa place.
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