Le dire impossible et le devoir de dire : des gloses pour dire l'indicible

2012 
Si la question de la possibilite ou l'impossibilite de dire l'experience concentrationnaire interroge l'ethique, elle pose, pour ce qui interesse notre point de vue de linguiste, un probleme aigu. Tiraille entre le "devoir dire" pour reprendre l'expression de Gardin et le "pouvoir dire", l'ancien deporte se heurte a l'heterogeneite du sens, a ces mots qui ne vont pas de soi, pour reprendre Authier-Revuz, a ces mots qui sont deja habites. Aussi, comment le langage parvient-il a dire et a devoiler cette experience traumatisante et destructrice qu'est l'experience concentrationnaire ? Comment dire ce qui, a priori, est indicible? Des recherches sur les differents modes de transmission de ce vecu ont montre que la nomination multiple etait un procede recurrent au sein des temoignages etudies. Ce foisonnement de gloses et d'autoreformulations contribue d'ailleurs, selon nous, a construire une ecriture de l'indicible, une ecriture de la memoire. Cet article, qui s'inscrit dans le cadre de l'analyse du discours et de la pragmatique, s'interrogera sur la presence et le role de ce metalangage. Nous verrons notamment que les nominations multiples ou la "non-coincidence" dans le dire pour reprendre Authier-Revuz(1993) refletent la difficulte des anciens deportes a dire le vecu concentrationnaire, qu'elles sont le signe d'une non-coincidence entre le sujet, la langue et le reel.
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