Production endogène d’éthanol chez le sujet vivant : le syndrome d’auto-brasserie

2020 
Objectifs Le syndrome d’auto-fermentation ou d’auto-brasserie est un phenomene rare et controverse. Il correspond a la production endogene d’ethanol lors de la fermentation des glucides par les levures du tractus gastrointestinal, pouvant atteindre jusqu’a plus de 4 g/L [1] . Un etat d’ebriete et des symptomes de l’alcoolisme chronique apparaissent alors chez des patients niant toute consommation d’alcool, qui presentent un regime alimentaire riche en glucides associe generalement a des comorbidites intestinales. L’objectif de ce travail est d’ameliorer les connaissances sur ce syndrome en etudiant les cas rapportes a ce jour dans la litterature. Methode Une recherche bibliographique sur les bases PubMed et Google Scholar a ete effectuee jusqu’a fevrier 2020. Resultats Le premier cas d’auto-fermentation a ete rapporte en 1948 chez un enfant africain de 5 ans [2] . Depuis, plusieurs cas ont ete recenses dans le monde, mais aucun cas n’a encore ete decrit en France. Plusieurs facteurs semblent influencer le developpement de ce syndrome. Le mode de vie de 28 patients a ete etudie par Cordell [3] . La consommation excessive de glucides semble associee a la production ethanolique. Une antibiotherapie repetee a l’origine d’une perturbation du microbiote intestinal favorise la proliferation d’agents responsables de la fermentation alcoolique. Les germes de la famille Candida ou Saccharomyces sont retrouves chez tous les patients decrits. De plus, Mezey et al. [4] ont mis en evidence la production endogene d’ethanol chez un tiers des patients ayant subi une chirurgie abdominale (n = 20). Enfin, une pathologie metabolique, gastro-intestinale ou hepatique est aussi souvent associee au syndrome d’auto-brasserie. Une alcoolemie a 2,34 g/L a notamment ete retrouvee chez un homme de 71 ans atteint de la maladie de Crohn sans consommation d’alcool [5] . Le cas d’une jeune fille de 13 ans atteinte d’un syndrome du grele court, presentant une alcoolemie a 3,5 g/L apres l’ingestion de sodas, a ete decrit en 2001 [6] . Un syndrome d’auto-fermentation uniquement urinaire a ete decrit chez deux patientes diabetiques mal equilibrees, ayant une ethanolurie elevee sans ethanolemie positive, associee a une glycosurie et a la presence de germes Candida [7] . Le diagnostic repose sur la recherche d’antecedents personnels et familiaux, des analyses biologiques, un interrogatoire detaille, une endoscopie et un test de provocation aux glucides apres absorption de 200 g de glucose et mesure de l’ethanolemie a differents temps. L’arret de l’antibiotherapie, l’administration d’antifongiques et un regime strict pauvre en sucres permettent generalement de retrouver et de maintenir une ethanolemie negative. D’un point de vue medico-judiciaire, les patients peuvent etre controles positif a l’ethylotest lors d’un controle routier, sans avoir consomme d’alcool. Les consequences judiciaires peuvent etre graves, de l’amende a l’arrestation voire l’incarceration. De plus, face au scepticisme des professionnels de sante, les patients, etablis alcooliques, peuvent etre orientes a tort vers un suivi psychiatrique et/ou cure de desintoxication. Conclusion Ce syndrome rare apparait preferentiellement chez des patients presentant une pathologie sous-jacente avec perturbation du microbiote intestinal. Les cas decrits dans la litterature mettent en evidence, le plus souvent, un etat d’ebriete a l’origine de grandes difficultes pour les patients. En raison de ses implications sociales et judiciaires, le syndrome d’auto-fermentation devrait pouvoir etre envisage chez tout patient presentant de maniere reguliere une concentration d’ethanol elevee qui nie avec insistance avoir ingere de l’alcool, meme s’il s’agit d’un phenomene tres rare et toujours controverse.
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