Suicide au pentobarbital : à propos d’un cas

2021 
Objectifs Les questions relatives aux droits en faveur des malades et des personnes en fin de vie font, depuis quelques annees, l’objet d’intenses debats tant parlementaires que doctrinaux. Pour l’heure, en France, seule l’euthanasie dite « passive » est admise. L’euthanasie « active » et le suicide assiste (ou aide au suicide), quant a eux, restent penalement condamnes (Loi n°2016-87 du 2 fevrier 2016). Cependant, ces pratiques, legales ou tout du moins non incriminables, chez certains de nos voisins, tendent a essaimer chez nous, en temoigne la saisie record de pentobarbital en date du 15 octobre 2019. Dans ce contexte, nous rapportons un cas de suicide au pentobarbital chez un homme de 61 ans. Methode Le corps sans vie d’un homme de 61 ans, avec un antecedent de maladie de Charcot, a ete retrouve a son domicile. L’examen realise au cours de la levee de corps etait sans particularite. Compte tenu du contexte, une recherche large des toxiques, des medicaments et des stupefiants a ete realisee dans le sang (peripherique sous-clavier) par HPLC-UV-DAD, GC-MS et LC-MS/MS. Resultats Les analyses ont mis en evidence la presence de pentobarbital (34 mg/L) et d’oxazepam (1,6 mg/L). L’ethanol a ete quantifie par GC-FID a 0,44 g/L. Conclusion Le pentobarbital est un barbiturique a action rapide, synthetise en 1928, et commercialise, soit sous forme d’un acide libre, soit sous forme de sel de sodium. En France, il est actuellement utilise en medecine veterinaire uniquement. Apres administration par voie intraveineuse, son delai d’action est quasi instantane. Administre par voie orale, son absorption est rapide, et le delai d’action oscille entre 20 et 60 min. Cette molecule est presque exclusivement metabolisee au niveau hepatique et eliminee par voie renale sous forme de metabolites inactifs (Tamlihat YA et al. Ann Toxicol Anal 2013). Tres liposoluble, le pentobarbital atteint rapidement les organes riches en lipides tels que l’encephale et le tissu adipeux (ce dernier constituant d’ailleurs un reservoir). Tres reglemente dans nombre de pays, le pentobarbital reste accessible via internet et/ou dans certains pays ou sa vente est moins controlee. Par consequent, et bien que rares, plusieurs cas d’intoxications mortelles, intentionnelles, n’impliquant ni du personnel medical ni des professionnel du monde veterinaire, ont ete decrits dans la litterature. Melo et al. rapporte ainsi un cas de suicide chez un homme de 37 ans, sans contact avec le milieu medical/veterinaire. Dans ce cas, les analyses toxicologiques mettaient en evidence la presence de pentobarbital dans le sang cardiaque a une concentration de 111 mg/L, associee a la presence d’ethanol (0,94 g/L), de diazepam (0,033 mg/L), de nordiazepam (0,050 mg/L), d’oxazepam (0,003 mg/L), temazepam (0,005 mg/L) et de metoclopramide (non quantifie) (Melo P et al. Forensic Sci. Int. 2017). Dans le cas rapporte ici, La concentration mesuree dans le sang peripherique sous-clavier (34 mg/L) est situee dans la zone de toxicite aigue. Concernant le mode du deces, le contexte clinique et les donnees de l’enquete sont clairement en faveur d’une origine intentionnelle. La seule question demeurant la participation ou non d’un tiers au suicide i.e. suicide assiste, et donc relevant d’une potentielle incrimination. En effet, comme mentionne a l’article 223-6 du Code penal, la loi punit la non-assistance a personne en danger : « quiconque s’abstient volontairement de porter a une personne en peril l’assistance que, sans risque pour lui ou les tiers, il pouvait lui preter (…) sera puni de 5 ans d’emprisonnement et 75,000 euros d’amende ».
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