Syndrome myogène et acidose métabolique, penser au déficit multiple en acyl-coenzyme A déshydrogénase

2019 
Introduction Le deficit multiple en acyl-coenzyme A deshydrogenase (DMAD), aussi appele acidurie glutarique de type II, est un trouble de l’oxydation des acides gras. Bien qu’habituellement diagnostique en periode neonatale, certaines formes se distinguent par un debut plus tardif et peuvent se reveler a l’âge adulte. Observation Une patiente de 29 ans, sans antecedents personnels, est prise en charge en reanimation pour une acidose lactique severe dans un contexte de myopathie en cours d’exploration. Depuis neuf mois, elle presentait des myalgies et une faiblesse musculaire des quatre membres d’aggravation progressive sans crampe ni fasciculation. Les explorations realisees en ville ont montre une rhabdomyolyse moderee avec un taux de creatine phosphokinase (CPK) a 500 UI/L. Aucune etiologie medicamenteuse, dysthyroidienne ou infectieuse n’a ete retrouvee. Devant une alteration de l’etat general marquee (perte de poids evaluee a 20 kg depuis le debut des symptomes), une aggravation du deficit moteur rendant impossible la station debout et l’apparition recente de troubles de la deglutition, la patiente est adressee aux urgences. L’examen clinique mettait en evidence un deficit moteur des quatre membres, predominant aux racines avec une nette amyotrophie, avec areflexie osteotendineuse, sans trouble sensitif. P Le bilan biologique montrait une acidose metabolique non compensee (pH a 7,28, pCO2 a 29 mmHg, HCO3− a 14 mmol/L) en rapport avec une hyperlactatemie a 11 mmol/L. Il existait une franche aggravation de la rhabdomyolyse avec des CPK a 8700 UI/L et une myoglobine a 10500 μg/L ainsi qu’une hypoglycemie a 1,1 mmol/L sans cetose. Il n’existait pas de syndrome inflammatoire et pas d’anomalie de la fonction renale ou de trouble ionique. Le DOT-myosite etait negatif. Le scanner thoraco-abdomino-pelvien etait sans particularite. La patiente est alors transferee dans le service de medecine intensive et reanimation L’electroneuromyogramme retrouvait des salves myotoniques lors de l’examen de detection. Un bilan metabolique complet est realise dans l’hypothese d’une anomalie du metabolisme glucido-lipidique decompensee par un jeune prolonge secondaire aux troubles de la deglutition. La chromatographie des acides organiques urinaires et le profil des acylcarnithines plasmatiques etaient en faveur d’un deficit multiple en acyl-coA deshydrogenases (DMAD). Un traitement par voie intraveineuse est debute avec majoration importante de l’apport glucose (3 litre de glucose 10 % sur 24 h) et introduction de L-carnithine (6 g par 24 h), de L-Glycine (2 g toutes les 6 h) et de Riboflavine (500 mg toutes les 8 h). L’evolution clinico-biologique est favorable avec disparition rapide des troubles de la deglutition permettant une reprise de l’alimentation orale (regime hypolipidique a 5-10 % de l’apport energique totale conseille). Apres normalisation du bilan biologique et equilibration glycemique, un relai oral du traitement a ete possible a des posologies identiques avec adjonction de coenzyme Q10 (200 mg trois fois par jour). Les repas ont pu etre enrichis en omega 3. Le diagnostic de DMAD a ete confirme par identification d’une heterozygotie pour les 2 mutations familiales c.1448C > T (exon 11) et c.1601C > T (exon 12) dans le gene ETFDH. Discussion Le DMAD est une maladie hereditaire rare, a transmission autosomique recessive, liee au deficit d’une flavoproteine de la chaine respiratoire mitochondriale : l’electron transfer flavoprotein (ETF) ou l’EFT deshydrogenase (ETFDH). Il existe trois groupes phenotypiques de DMAD en fonction de l’âge au debut des symptomes et de leurs severites. Le DMAD a debut tardif (type III) se manifeste souvent par des symptomes musculaires chroniques, parfois associees a une cardiomyopathie, une insuffisance hepatique et une insuffisance respiratoire restrictive, entrecoupees de decompensations metaboliques aigues, favorisees par des situations responsables d’un stress catabolique (jeune prolonge, sepsis ou grossesse). Des complications graves (encephalopathie sur hyperammoniemie, hypoglycemie profonde, troubles du rythme ventriculaire) peuvent mettre en jeu le pronostic vital en l’absence de traitement adapte. Des examens simples comme la chromatographie des acides organiques urinaires et le profil des acylcarnithines plasmatiques permettent d’orienter le diagnostic. Le DMAD doit etre confirme par l’identification de mutation(s) au sein du gene codant pour l’ETFDH (90 % des cas) ou des genes codant pour les sous-unites α et β de l’ETF (  Conclusion Le diagnostic de DMAD doit etre evoque devant toute atteinte musculaire, aigue ou chronique, associee a des troubles metaboliques aigues.
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