Communautés locales et utilisation durable de la faune en Afrique Centrale

2017 
En Afrique centrale, pour de nombreuses familles rurales, la chasse constitue une source de nourriture souvent primordiale et la vente des excedents de gibier, une source complementaire de revenus monetaires. Cependant, avec l'accroissement demographique soutenu, la demande en viandes par les poles de consommation (villages, villes secondaires, metropoles) augmente progressivement, avec, pour consequence, une exploitation accrue et non durable de nombreuses populations animales sauvages. La quantite de viandes sauvages consommee annuellement dans le bassin du Congo est importante et representerait 4 a 5 millions de tonnes metriques, soit approximativement l'equivalent de la moitie de la production bovine de l'Union europeenne. A defaut d'alternatives efficaces et durables, et compte tenu de l'impossibilite d'interdire la consommation des viandes sauvages, un consensus emerge progressivement sur la necessite de mettre en place en Afrique centrale les conditions d'une exploitation durable des especes sauvages pour promouvoir simultanement la conservation de la biodiversite, la securite alimentaire et les moyens de subsistance locaux. En d'autres termes, autoriser (en dehors des aires protegees) l'exploitation des especes les plus resilientes par et pour les communautes locales, et en promouvoir la commercialisation au sein de filieres formelles (en maintenant simultanement des restrictions sur les especes vulnerables) pourraient permettre de donner l'impulsion necessaire a une gestion plus durable des especes sauvages. C'est dans ce contexte que quatre pays (Gabon, Republique centrafricaine, Republique du Congo et Republique democratique du Congo) ont sollicite l'assistance de l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) et du Fonds pour l'Environnement Mondial (FEM) pour conduire des tests pilotes de gestion participative de la faune et de la chasse, documenter et capitaliser les lecons apprises en vue de garantir la duplication des modeles juges pertinents. Un projet sur 5 ans intitule "Gestion durable de la faune et du secteur de la viande de brousse en Afrique centrale" a ete lance en fin 2012. Le present ouvrage s'inscrit dans le cadre general de la documentation des experiences et des lecons apprises du projet. Il comprend trois parties distribuees en treize chapitres. La premiere partie introduit le questionnement et le contexte abordant les aspects economiques, nutritionnels et juridiques lies a la chasse dite "villageoise" et a l'utilisation de la faune sauvage par les populations locales. Dans une deuxieme partie, les acteurs impliques dans la mise en oeuvre du projet "Gestion durable de la faune et du secteur de la viande de brousse en Afrique centrale" decrivent les retours d'experience dans les sites pilotes du projet en Republique du Congo, Republique democratique du Congo et Republique du Gabon. Ces sites representent des conditions socio-economiques et ecologiques tres diverses que l'on retrouve dans la zone forestiere de l'ensemble des pays du bassin du Congo, ils sont a ce titre riches d'enseignements pour le gestionnaire ou le responsable des orientations politiques. Enfin la troisieme partie est une tentative de synthese des experiences venues du terrain et de l'analyse de la litterature qui met en exergue les possibles voies qui s'ouvrent pour une gestion plus durable de la faune sauvage par les communautes locales dans le bassin du Congo. L'ensemble des experiences presentees dans cet ouvrage propose des reponses concretes pour le futur de la gestion durable de la chasse villageoise en Afrique centrale. Premierement, le cadre juridique et reglementaire doit evoluer pour permettre une participation active des communautes locales, voire une gestion locale negociee de la faune sauvage, tout en restant suffisamment flexible pour s'accommoder aux divers autres objectifs de gestion et aux diverses formes de gouvernance locale, les mieux adaptees a chaque contexte. Deuxiemement, le secteur des viandes sauvages en Afrique centrale doit sortir de l'informel et devenir officiellement partie integrante des politiques gouvernementales de reduction de la pauvrete et de securite alimentaire. A court terme, le developpement de systemes alimentaires durables en Afrique centrale doit explicitement inclure la contribution des produits carnes sauvages (fauniques et halieutiques). Troisiemement, toute demarche visant a rendre les communautes locales responsables et redevables de la gestion de la faune est vouee a l'echec si elle n'est pas associee a une volonte politique et a un processus d'accompagnement vers la decentralisation de la gestion des ressources fauniques et de renforcement de la societe civile. La devolution des droits et responsabilites doit se faire par etapes et prendra du temps. Quatriemement, la gestion durable de la faune ne peut etre une reussite que si l'ensemble des parties prenantes parvient a coconstruire un objectif de gestion consensuel sur ces espaces multifonctionnels et multiusagers. Enfin, un changement de paradigme est necessaire, afin que les parties prenantes a la gestion de la faune acceptent de travailler sur la base d'une demarche adaptative, ou le droit a l'erreur existe, mais ou les risques sont anticipes, pour mieux repondre aux defis continuellement changeants. Loin de proposer un recueil de solutions miracles, cet ouvrage rapporte des lecons apprises qui sont autant de piliers poses pour poursuivre l'appui a l'emergence d'une gestion locale et participative de la faune et de la chasse en Afrique centrale. Nous esperons que les recommandations emises dans cet ouvrage pourront inspirer les decideurs, les gestionnaires et les bailleurs de fonds, pour continuer de tracer un chemin qui reste long. (Resume d'auteur)
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