Hépatite aiguë sévère récidivante sous déférasirox chez un patient porteur d’une stomatocytose

2018 
Introduction Nous rapportons le cas d’une hepatite sous deferasirox d’evolution particulierement severe avec menace repetee du pronostic vital. Observation Un patient de 43 ans nous est transfere du service de reanimation dans les suites d’un episode d’hepatite aigue en novembre 2017. Dans ses antecedents, on retenait essentiellement une anemie hemolytique chronique ayant debutee en periode neonatale, compliquee de lithiases vesiculaires symptomatiques, d’un unique foyer d’hematopoiese extramedullaire d’un angle costovertebral et d’une surcharge martiale en l’absence de transfusion anterieure (confirmee par un estimation en IRM hepatique a 230 μmol/g) traitee par deferasirox depuis novembre 2015. Alors qu’un diagnostic d’elliptocytose etait evoque dans un hopital de peripherie, une splenectomie associee a une cholecystectomie ont ete realisees en juillet 2017. Au cours de l’annee 2017, il a presente 3 episodes d’hepatite aigue severe avec cytolyse hepatique, ictere a bilirubine conjugee et insuffisance hepatocellulaire, sans qu’une majoration concomittante de l’hemolyse ne soit observee. Le tableau clinicobiologique etait a chaque fois different : –le premier avec HTA et hemorragie sous-conjonctivale ; –le second avec etat de choc, defaillance renale, pancreatite aigue oedemateuse et acidose lactique severe (pH 6,89, hyperlactactemie 17 mmol/L) ; –le troisieme avec coma hypoglycemique et acidose lactique. Chaque episode etait resolutif sans sequelle avec les mesures symptomatiques et l’arret des medicaments hepatotoxiques en cours. Le traitement par deferasirox avait ete repris de maniere systematique apres les deux premiers episodes alors que le patient ne presentait plus d’hyperferritinemie. En novembre 2017, au decours du troisieme episode, le patient a ete transfere de la reanimation dans notre service de medecine interne. Alors que nous posions un diagnostic de stomatocytose hereditaire a cellules deshydratees sur des donnees ektacytometriques, l’enquete etiologique de ces episodes d’hepatite aigue severe demeurait negative en depit d’un large bilan infectiologique (serologies VHA/VHB/VHC/VHE/HSV/VZV/EBV/CMV/leptospirose/PVB19/dengue/fievre Q, PCR VHE/EBV/CMV/ADV/Dengue, hemocultures), auto-immun (AAN, ANCA, anti -actine/-LKM/-Mito 2/-LC1/-TPO/-thyroglobuline/-transglutaminase/-facteur intrinseque/-cellule parietale gastrique), cuprique (ceruleoplasminemie, cupremie, cuprurie) et toxicologique. Devant la suspicion d’une toxicite du deferasirox–seul medicament present a chacun de ces episodes, l’apparition d’une carence martiale et la resolution de la surcharge hepatique confirmee a l’IRM, le traitement chelateur a ete arrete. Depuis l’arret de celui-ci et avec un recul d’un an, il n’a pas presente de nouvel episode. Discussion La stomatocytose familiale a hematies deshydratees est une anemie hemolyique congenitale rare, a transmission autosomique dominante. Ses complications sont dominees par celles de la surcharge martiale qui lui est frequemment associee, y compris en l’absence de soutien transfusionnel, et pouvant relever d’un traitement chelateur. La toxicite hepatique du deferasirox est bien connue mais se resume le plus souvent a une elevation asymptomatique et reversible des transaminases. Des episodes d’acidose metabolique, de pancreatite aigue et d’insuffisance hepatique ont ete rapportes depuis la commercialisation du deferasirox sans qu’un lien de causalite n’ait pu etre etabli. N’ayant pu identifier d’alternative etiologique chez notre patient, nous avons retenu le diagnostic de toxicite hepatique du deferasirox pour expliquer ces 3 episodes successifs d’insuffisance hepatocellulaire. Au-dela de la resolution de la surcharge en fer sous chelateur, l’apparition d’une carence martiale a ete probablement le facteur d’aggravation de la toxicite hepatique du deferasirox, par analogie au deferoxamine–un autre chelateur martial, dont nous savons deja que le risque de toxicite oculaire et auditive se majore a mesure que la ferritinemie diminue. Notre observation est originale par la gravite et la rapidite d’installation des episodes presentes par notre patient ainsi que par leur polymorphisme clinicobiologique. Conclusion La toxicite hepatique du deferasirox semble pouvoir se presenter sous la forme d’episode d’hepatite aigue severe avec insuffisance hepatocellulaire, notamment chez des patients dont la surcharge martiale est resolue.
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