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Lire et voir

2011 
Le theâtre, etymologiquement « lieu d’ou l’on voit » (theatron), implique des dispositifs qui orientent plus ou moins nettement le regard du spectateur. L’optique de la scene a l’italienne tend ainsi a construire une vision vectorisee et hierarchisee : structuree par les exigences de la perspective, elle suppose un point de vue privilegie, capable d’embrasser l’ensemble du spectacle et de lui donner son sens. Une telle optique peut etre soutenue ou explicitee par les graphies qui s’ecrivent sur scene. Mots, phrases ou textes donnes a lire guident le regard du spectateur, lui imposant ce qu’il doit voir ou, de maniere moins contraignante, l’accompagnant dans la selection et la hierarchisation des elements presents sur scene. Mais, au theâtre, il ne s’agit pas toujours de lire pour mieux voir. Les graphies qui envahissent la scene contemporaine peuvent aussi inviter le spectateur a deplacer son regard. Elles le detournent d’elements traditionnellement centraux, notamment les acteurs, pour lui suggerer d’autres modes d’intelligence du spectacle ou lui offrir d’autres points d’accroche imaginaires et emotionnels. En ce sens, les graphies contribuent a deconstruire les rapports hierarchiques traditionnels entre les elements presents sur scene. Le spectateur, qui ne peut tout voir et tout lire, est amene a operer sa propre selection parmi ces elements : les graphies tendent aussi a diffracter la reception. Il s’agit des lors de lire pour voir autrement, et pour voir differemment des autres spectateurs : l’impossibilite de tout lire et de tout voir invite chacun a construire sa propre vision et sa propre lecture, necessairement singulieres.
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