La limite entre névrose et psychose : savoir ou lutter ? Exemple du lien entre TOC et schizophrénie

La schizophrenie et le trouble obsessionnel-compulsif appartiennent, depuis leurs toutes premieres descriptions, a deux entites nosographiques distinctes. Selon la theorie analytique, ces deux troubles sont censes emerger sur des « structures » fondamentalement differentes : nevrotique ou psychotique. Neanmoins, un lien entre la « nevrose obsessionnelle » et la « psychose » a rapidement ete decrit. Les nomenclatures actuelles permettent de poser les deux diagnostics chez un meme sujet, mais elles restent en partie heritieres des categories psychanalytiques. Pourtant, il arrive qu’un doute persiste sur la nature du symptome obsessionnel observe. Tout d’abord parce que les symptomes obsessionnels sont frequents dans la schizophrenie, au point que certains auteurs ont fait l’hypothese d’une sous-categorie specifique, le « schizo-obsessive disorder » (Poyurovsky et al., 2012 ; Scotti-Muzzi et Saide, 2017). Mais aussi parce que les etudes cliniques ont conduit a un tournant majeur de la description du TOC a partir du DSM-IV : la possibilite d’un TOC avec un mauvais insight (Foa et al., 1995). Ce qui fait desormais la difference entre une obsession et une idee delirante n’est plus la reconnaissance de son caractere absurde, mais la lutte anxieuse qu’elle provoque (Oulis et al., 2013). Cette approche brouille les distinctions entre troubles anxieux et troubles psychotiques, nous forcant a reinterroger nos criteres diagnostiques. De plus elle vient ebranler de facon profonde nos representations de la pathologie mentale et souligne les tensions entre les approches dimensionnelles et categorielles.