Fragments d’anthropologie clinique en action

La condition existentielle humaine implique en l’homme autant l’inhumain que l’humain, l’ombre que la lumiere, la folie que la raison. Cette conception « entiere » de la vie humaine, au fondement de laquelle se trouve la notion de pulsion, se voit constamment exposee au risque d’une reduction psychiatrique objectiviste. Ainsi en va-t-il de l’appauvrissement de la psyche sous le regard des neurosciences, du sociologisme et de l’economisme: psyche qui est le lieu d’expression de la fragilite, constitutive de la condition humaine, decoulant de l’equilibre instable et precaire, toujours a refaire, entre ombre et lumiere au sein de toute vie. Suivant une tendance propre a la societe actuelle, voulant eradiquer le mal, ou tout au moins le faire disparaitre a nos sens, dans un monde d’hypertransparence ou le negatif est occulte, la psychiatrie en vient a ne considerer que des troubles, des comportements, et non des individus en souffrance. De la, la vie se trouve privee de destin, de sa dimension tragique, de sa transcendance, au profit d’une anesthesie generalisee, sans souffrance ni douleur apparente. Comme alternative a une psychiatrie objectivante, le geste « anthropoclinique », qui considere l’humain dans son entierete singuliere, va au-dela de la simple alliance therapeutique scientifique et, mu par le souci ethique d’une clinique veritablement anthropologique, rencontre l’Autre dans une alliance existentielle.