Pech Maho (Sigean, Aude)
2011
La fouille du comptoir littoral protohistorique de Pech Maho, reprise en 2004, a fait l'objet de entre 2008 et 2010 d'un second programme triannuel. Les travaux entrepris durant cette periode ont principalement porte sur les phases recentes du site, plus precisement sur les phases III (v. 325-225/200 av. n. ere) et IV (v. 200 av. n. ere), cette derniere ayant ete definie a l'occasion du programme en cours. En effet, il est apparu que la destruction brutale du site intervenant dans le dernier quart du IIIe s. av. n. ere ne signifiait pas l'abandon du gisement, mais que lui succedait immediatement une phase caracterisee par une serie de manifestations a caractere rituel, qui culminent avec l'erection d'un bucher funeraire (fouille anciennement) ayant recu simultanement les corps d'une quinzaine d'individus. Le triannuel 2008-2010 a ete l'occasion de preciser les observations preliminaires realisees entre 2005 et 2007, en confirmant definitivement le sequencage venant d'etre evoque. Ce dernier autorise une tres large relecture des donnees de fouille anciennes, ou bon nombre de documents naguere depeints comme etant caracteristiques d'une « couche de guerre » (restes d'equides, pieces d'armement...) doivent en realite etre replaces dans ce contexte rituel ou se conjuguent sacrifices d'equides, depot d'armes, de pieces de harnachement ou d'autres objets porteurs de sens, sans compter d'autres manifestations jusque la peu documentees. La presence de restes humains, dont certains semblent avoir recu un traitement particulier, participe egalement de cette phase ; ici encore, une relecture des donnees de fouille anciennes est dorenavant possible, revelant le caractere tout a fait exceptionnel de cette phase. La fouille 2008-2010 a ainsi porte sur trois zones distinctes. La premiere (zone 77) a porte sur une portion de l'ilot I, accole au rempart meridional, portion qui n'avait ete que partiellement concernee par les recherches menees par J. Campardou puis Y. Solier dans les annees 1960 et 1970. La fouille a revele l'existence d'un vaste « depotoir » a ciel ouvert d'au moins une centaine de metres carres au sol, mis en place posterieurement a la destruction du site. Amenage au milieu des ruines ou des bâtiments desaffectes et delimite par endroits par des murs nouvellement construits, cet ensemble se materialise par une imposante couche de cendres de plusieurs dizaines de centimetres d'epaisseur, renfermant un abondant mobilier (ceramiques brisees, restes de faune, coquillages...), interprete comme etant les restes de repas collectifs. La presence d'un chenet en terre cuite ou encore d'une broche a rotir est a mettre en rapport avec la preparation de ces repas (banquet ?), la quantite importante de cendres temoignant quant a elle de feux particulierement nourris, peut-etre etales dans le temps. Ce qui prend la forme d'un veritable « autel de cendres » fait suite a des depots de restes d'equides realises sur la portion de rue situee en facade, et precede la mise en place du bucher collectif evoque en preambule. L'ensemble parait s'inscrire dans une demarche coherente, dont la signification precise nous echappe, mais qu'il serait vain de vouloir deconnecter de l'episode violent qui intervient a Pech Maho durant les dernieres annees du IIIe s. av. n. ere. Une nouvelle zone de fouille (zone 78) a ete ouverte en 2008 dans la partie nord-occidentale du plateau de Pech Maho. De ce cote, un nouvel ilot a ete fouille pour ainsi dire integralement, revelant tout d'abord que l'etat visible (IIIe s.) constituait non seulement la reprise d'un bâtiment anterieur de plan manifestement mediterraneen (type « maison a pastas »), mais se superposait egalement a un edifice monumental dont la chronologie remonte au moins au milieu du Ve s. av. n. ere, edifice indique par une serie de quatre bases monolithiques ayant recu des piliers en bois, implantees en bordure occidentale de la rue 7. Dans son etat de la fin du IIIe s., ce bâtiment dont l'originalite reside en partie dans l'emploi quasi exclusif de la terre massive, comprend en realite deux parties. La premiere semble moins correspondre a une simple maison qu'a une entite a vocation economique (en l'occurrence commerciale), associant un entrepot (incendie au moment de la destruction des annees 225-200), une piece de vie et un espace plus difficile a caracteriser (cour ?), accessible par un couloir ouvert au sud sur la rue 6. Accole a l'ouest, decale sur le plan topographique, deux pieces en enfilade accessibles au sud via un escalier « monumental » se caracterisent par la presence de foyers, dallages et bases maconnees interpretees avec vraisemblance comme des supports de steles. La presence de crânes humains exposes est en outre attestee, de meme que le demantelement systematique des elements porteurs de sens, vraisemblablement intervenu au moment du pillage concomitant de l'acte violent marquant la fin de l'habitat stricto sensu. La phase post destruction est ici particulierement bien attestee, notamment par la presence d'un important depot d'ossements d'equides au niveau du couloir precedemment cite. Preuve supplementaire qu'une partie du bâti etait alors en elevation, ce depot tout a fait singulier qui comporte plusieurs sequences a egalement livre une amphore vinaire, de l'armement ainsi que des mors de chevaux ; enfin, il temoigne indirectement du caractere particulier que revetait auparavant cet ilot, la concordance topographique entre ce type de vestige et des edifices particuliers (bâtiments ou espaces publics, fortification...) etant dorenavant confirmee a l'echelle du site. La derniere zone (zone 71) correspond a la fortification, et plus precisement aux abords de la porte principale. Apres avoir procede a une relecture fine des differents etats du rempart, de la porte en elle-meme et de la tour en quart de cercle qui la flanque cote Ouest, la fouille s'est concentree sur les abords exterieurs de cette porte, au niveau des « defenses avancees » en partie degagees par Y. Solier dans les annees 1970. Il apparait desormais que ces amenagements participent d'une reorganisation globale du systeme d'acces, intervenant a la charniere des IVe-IIIe s. av. n. ere, soit les debuts de la phase III. De puissants terrassements sont destines a amenager une rampe d'acces E-O menant a la porte charretiere, tandis qu'une passerelle correspond au sud a un acces pieton enjambant le nouveau fosse creuse a ce moment. L'ensemble participe d'une reorganisation complexe du systeme de defenses, et notamment des abords de la porte principale ou sont manifestement mis en œuvre des principes poliorcetiques empruntes au registre hellenistique. La fouille a egalement permis de retrouver l'extremite occidentale du systeme de fosse archaique, jusque-la fort mal documente. Or, bien qu'ampute par les reamenagements du IIIe s., ce systeme s'avere plus complexe que prevu. En effet, l'idee d'un fosse unique date de la phase Ib (v. 540-510) doit dorenavant etre abandonnee : deux ouvrages fossoyes se succedent, en se recoupant partiellement, le premier etant contemporain du tout premier etat de la fortification (phase Ia, v. 560-540). Un des apports les plus novateurs de la zone 71 est la mise en evidence, au niveau du fosse correspondant a l'etat IIIe s. de la fortification, de depots
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