Chapitre 1. Crise sociale et responsabilisation des groupes précaires : analyse sociologique

Adoptant une analyse sociologique, ce premier chapitre resitue les processus produisant le chomage et l’insertion dans le contexte macrosocial de la Belgique, et plus precisement de la Wallonie, notamment en tant qu’entites situees a l’interieur de l’Union europeenne. En se fondant sur la theorie des rapports de pouvoir et de subordination, il tend a montrer combien l’exigence de competitivite et de rentabilite financiere produit un manque structurel d’emplois convenables. Ce manque modifie, en defaveur des groupes les plus faibles, les rapports sociaux entre les acteurs socioeconomiques. La modification se traduit par le passage d’un mode de production hierarchique des inegalites vers un mode qui fonctionne davantage sur la segmentation des groupes et l’individualisation. Jusqu’a la fin des annees 1970, l’espace national connaissait un equilibre des relations de pouvoir entre l’economique et le social. Dans le cadre de la societe hierarchique de production, le salariat du haut tirait le salariat du bas. Aujourd’hui, dans une societe d’opportunite de marche, de selection et de segmentation forte des groupes sociaux et vu que l’economique internationalise et la concurrence sociale predominent sur la logique d’equilibre social, le salariat du haut ne parvient plus a tirer vers le haut le salariat du bas. Cela conduit a analyser les effets de la restructuration des groupes sociaux qui en resulte.Face aux restructurations des entreprises, au manque structurel d’emplois et au chomage de masse, les pouvoirs publics ont mis en place des politiques d’emploi et d’insertion socioprofessionnelle en direction notamment des chomeurs, des personnes sans-emploi et assistees. Ces politiques ont ete mises en œuvre par l’intermediaire de contrats prenant diverses formes. L’analyse de ces politiques permet de cerner un enjeu central. Celui-ci concerne le passage d’une conception du chomage vu comme un risque social majeur produit par les acteurs dominants a celle du chomage ou de l’aide sociale, consideres comme dependant essentiellement de la responsabilite propre de l’individu. Pour conclure, on examine si les politiques d’insertion et d’activation servent soit a un renforcement du controle de la responsabilite individuelle des chomeurs, soit a la construction d’un parcours vers l’emploi convenable et la reconnaissance sociale.