Transition chômage-emploi : employeurs et demandeurs d'emploi face à l'activité réduite
2016
Depuis le debut des annees 90, les politiques publiques d’emploi des pays de l’OCDE sont caracterisees par une logique d’activation des depenses passives en direction des chomeurs, en raison d’une montee generalisee du chomage qui engendre notamment des couts plus difficilement supportables pour l’assurance chomage (Ehrel, 2014). L’objectif principal est de rendre plus attractif le retour a l’emploi et de limiter les effets desincitatifs de l’indemnisation du chomage. C’est ainsi qu’a ete mis en œuvre, en France en 1986, le mecanisme dit d’activite reduite, qui aspire a securiser les revenus des demandeurs d’emploi et rendre incitatif leur retour a l’emploi, qu’ils percoivent ou non une allocation de retour a l’emploi. Le principe general est de permettre a un demandeur d’emploi d’occuper un emploi, tout en conservant une partie de son indemnisation au titre du chomage, de sorte que le revenu global tire du cumul emploi-salaire soit superieur a celui de l’allocation chomage. Depuis sa creation, le nombre de demandeurs d’emploi en activite a fortement augmente, jusqu’a etre multiplie par deux entre 1995 et 2011 (Ourliac et Rochut, 2013). Pour autant, aucune etude n’eclaire la question des externalites produites par le regime lui-meme. Tout au plus posent-elles les termes du debat (Gurgand, 2002 ; Cahuc et Prost, 2015). Aucune ne s’interroge sur l’appropriation par les individus et les entreprises de la connaissance de l’indemnisation du chomage. Face la montee simultanee des emplois de courte, voire tres courte duree, des contrats a temps partiel et des demandeurs d’emploi en activite reduite, la question est de savoir si l’acceptation de telles conditions d’emploi n’est pas a meme de permettre aux entreprises de trouver une main d’œuvre disponible moins regardante sur les conditions de travail et d’emploi, et ainsi de reporter sur le systeme d’assurance chomage leur besoin exprime de flexibilite de l’emploi. Permet-il aux employeurs de recruter une main d’œuvre a la fois disponible, peu couteuse, et incitee a occuper ce type d’emplois ? Si certaines etudes soulignent l’existence d’un effet de selection a la pratique d’une activite reduite, qui joue d’ailleurs un effet contraste sur la sortie du chomage, elles ont porte exclusivement la focale sur les determinants individuels de la pratique d’une activite reduite et de ses effets sur la sortie du chomage (Granier et Joutard, 1999 ; Fontaine et Rochut, 2014 ; Fremigacci et Terracol, 2015 ; Issehnane et al. 2015).
L’originalite et la motivation de cette communication sont de questionner la responsabilite des employeurs dans un mecanisme d’interessement a l’emploi, pense des son origine pour les demandeurs d’emploi. C’est ainsi le role et la place des employeurs dans ce phenomene croissant de reprise d’activite qui est interroge. Existe-t-il un lien entre ce mecanisme et des pratiques de recrutement des entreprises ? Cette communication presente les resultats d’une recherche qui a interroge l’hypothese selon laquelle les entreprises connaissent les regles de cumul salaire/indemnite chomage et lui attribuent une fonction de compensation. Elles s’en serviraient alors comme element d’optimisation, soit en amont dans la definition des offres (avec un effet de nivellement par le bas), soit en aval dans la negociation, au cours de l’entretien avec le candidat. Le developpement des contrats courts trouve-t-il pour partie son origine dans la forme actuelle du regime d’assurance chomage ? Par ailleurs, le regime actuel de cumul allocation-salaire est-il a meme de modifier l’acceptabilite de conditions d’emploi moins favorables pour les demandeurs d’emploi ? Et in fine peut-il avoir un effet sur la qualite de l’emploi ? Pour apporter des elements de reponse a ces questions, une approche croisee « employeur-demandeur d’emploi en activite » a ete developpee (voir encadre 1). Cette approche permet de mettre en relation les pratiques de recrutement des entreprises avec la facon dont les politiques incitatives au retour a l’emploi œuvrent sur la securisation des parcours professionnels des demandeurs d’emploi.
Cette communication retracera dans une premiere partie le paradigme de l’activation des depenses passives qui questionne la responsabilite des employeurs puis presentera les besoins et difficultes exprimes par les entreprises en matiere de recrutement dans les quatre secteurs d’activite retenus, afin de les mettre en miroir avec les problematiques de qualite de l’emploi posees par les pratiques de l’activite reduite.
- Correction
- Source
- Cite
- Save
- Machine Reading By IdeaReader
0
References
0
Citations
NaN
KQI